COULEUR, BRILLANCE, SAVEUR... VOICI COMMENT RECONNAîTRE UNE VIENNOISERIE ARTISANALE

En boulangerie, les artisans sont libres d'acheter des viennoiseries industrielles à un grossiste ou de tout faire eux-mêmes. Ils n'ont pas non plus l'obligation de le dire. Alors comment faire la distinction? RMC Conso vous guide.

La coupe du monde du pain au chocolat (ou chocolatine, puisqu'elle s'est tenue près de Toulouse) a été remportée, dimanche 10 mars, par un Français, Dimitri Bordon, boulanger à Cugnaux en Haute-Garonne.

Si le concours met à l'honneur un savoir-faire vieux de presque 200 ans, les pains au chocolat vendus en boulangerie ne sont pas toujours faits maison. Il est même compliqué de savoir quelle est la part de viennoiseries industrielles et la part de viennoiseries artisanales: il n'y a aucun chiffre officiel sur le sujet.

La raison est simple: les boulangers n'ont pas l'obligation de réaliser leurs viennoiseries eux-mêmes, ni d'ailleurs de le préciser à leurs clients. Le titre les contraint uniquement à faire le pain dans leur local. La règle est la même pour les pâtisseries: un statut de pâtissier ne garantit pas du fait maison.

Au moins 50% de viennoiseries industrielles?

En 2020, la Fédération des entreprises de boulangerie avançait un chiffre de 80% de viennoiseries vendues surgelées (en volume et pour la globalité des ventes, chaînes de boulangeries industrielles incluses). Contactée par RMC Conso, elle nous explique que ce pourcentage reposait "sur une étude de l'institut Gira de 2017" et qu'elle ne dispose pas de données plus récentes.

Plus récemment, en 2022, une étude de FranceAgriMer affirmait que 50% des boulangers achetaient des viennoiseries industrielles. Mais ce chiffre résultait d'un sondage fait auprès de 482 professionnels et non d'un contrôle.

Une situation qui révolte Michel Cornille, ancien boulanger en Côte d'Or joint par RMC Conso.

"Les industriels parviennent à très bien imiter ce qu'on fait, alors c'est très compliqué de faire la différence, avance-t-il. Et comme la loi n'oblige pas les artisans à indiquer l'origine de ce qu'ils vendent, certains font ce choix parce que c'est moins cher. Avec l'augmentation du prix de l'électricité et de la main d'oeuvre, cela revient à au moins 60 centimes l'unité pour faire ses pains au chocolat, là où les industriels les vendent autour de 30 centimes."

Une charte qualité: la charte Saint Honoré

Michel a décidé en 2016 de créer son propre label qualité, la charte Saint Honoré, qui réunit aujourd'hui environ 600 artisans.

Via leur adhésion, ces derniers s'engagent à fabriquer eux-mêmes tout ce qu'ils vendent et à utiliser au maximum des matières premières locales.

Il a même conclu un partenariat avec l'association 60 millions de consommateurs pour s'assurer du sérieux des boulangers adhérents.

Des conseils pour faire la différence

Pour reconnaître une boulangerie aux viennoiseries artisanales, il conseille de "bien regarder la vitrine. S'il y a trop de produits différents, cela peut être louche, parce que ça prend du temps de tout faire soi-même. Demandez au boulanger de vous ouvrir les portes de son atelier, s'il refuse, fuyez!"

Pour Thierry Rabineau, de la boulangerie Moderne, dans le 5e arrondissement de Paris, interrogé par RMC Conso, "il suffit de bien observer le pain au chocolat: un pain au chocolat maison est fortement strié sur les côtés, c'est la marque d'un feuilletage bien travaillé."

"Vous pouvez aussi faire le test du café, ajoute-t-il. Un pain au chocolat industriel trempé dans du café, c'est une éponge, ça absorbe le café"."Un pain au chocolat industriel a une couleur un peu terne, abonde Sylvain Belouin, de la boulangerie Le Quatre à Brissac Loire Aubance, près d'Angers, et champion de France 2023 du pain au chocolat. Un pain au chocolat artisanal est bombé, brillant, et surtout il a un bon goût de beurre".

Consulté par RMC Conso, il regrette lui aussi qu'il n'y ait pas d'obligation d'affichage de la confection, maison ou industrielle, des viennoiseries.

"Un voisin vend son pain au chocolat plus cher que nous, et pourtant c'est de l'industriel. Nous on fait tout maison, on embauche du personnel pour cela, et à côté il y en a qui ne s'embêtent pas et gagnent plus d'argent... Cela dégoûte un peu..." déplore-t-il."Mais les clients ne sont pas dupes, nuance-t-il. C'est pour cela qu'ils viennent chez nous. Ils reconnaissent la qualité. Et c'est pour cette raison que je commence à travailler à 3 heures, que je fais mon pain jusqu'à 14 heures, et ma viennoiserie de 14 à 17 heures."

Plusieurs labels existent

Sylvain n'a pas fait le choix de se labelliser, pourtant quelques labels existent. Thierry Rabineau est Boulanger de France: un label créé en 2020 par la Confédération nationale de la boulangerie-pâtisserie pour garantir aux clients une qualité artisanale. Ils sont à peu près 1000 artisans à y avoir adhéré, moyennant 310 euros HT tous les deux ans.

La région Centre Val de Loire a également lancé une initiative similaire, via sa chambre des métiers et de l'artisanat, le label Viennoiseries 100% maison, qui se targue de regrouper 270 boulangers.

Au total, près de 2000 établissements sont labellisés. Un chiffre relativement faible, sur les 39.500 boulangeries-pâtisseries ouvertes en France. Mais indiquer si l'établissement fait ses viennoiseries, ses pâtisseries et son offre de snacking maison pourrait devenir obligatoire dans les prochaines années.

La semaine prochaine, une proposition de loi sur le fait maison sera examinée à l'Assemblée nationale. Elle vise à contraindre les restaurants à afficher une mention "non fait maison" le cas échéant. Elle concerne aussi les établissement de vente à emporter et pourrait donc s'appliquer aux boulangeries-pâtisseries. Si elle était adoptée, elle ne serait pas en vigueur avant 2025.

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